Réseau Bastille editorial,editorial-accueil MACRON  jusqu’à quand ? Claude Agen

MACRON  jusqu’à quand ? Claude Agen

Marx admirait Balzac comme entomologiste de la société française.

Macron est un personnage balzacien.

En 2016, quand il se lance en politique, un meeting est organisé à Amiens mais la salle risque d’être vide, alors Hollande téléphone à Cambadélis pour que des militants du PS la remplissent…

L’air du temps étant au dégagisme, une partie du Capital va miser sur lui avec un objectif limpide : moderniser le  pays à son profit en cassant encore plus que ses prédécesseurs les acquis sociaux.

Élu, il s’attellera consciencieusement à cette tâche : loi Travail, aides colossales aux entreprises…

Mais sa morgue, son arrogance, son mépris pour les petits déclencheront la révolte des Gilets Jaunes.

Alors il inaugurera le triptyque de sa méthode de sortie de crise :

  • le discours, la logorrhée pour camoufler les actes avec “Le Grand Débat” ;
  • le carnet de chèques pour éteindre le feu ;
  • la matraque pour rétablir l’ordre.

Avec la COVID, il emploiera cette méthode : le discours martial, le “quoi qu’il en coûte” et la répression avec obligation du pass vaccinal pour le personnel soignant en violation du contrat de travail.

Avec l’inflation, ce sera le recours aux chèques Energie, aux ristournes sur les carburants et surtout pas l’échelle mobile des salaires.

Résultat en 2024, la Dette flambe, les agences de notation trépignent, la bourgeoisie s’inquiète mais elle  peut se rassurer, il n’augmentera pas les impôts sauf peut-être une TVA dite “sociale”.

Alors qui paiera ?

Les chômeurs en restreignant leurs droits à l’indemnisation, les assurés sociaux, les fonctionnaires par la casse du statut notamment des procédures de licenciement…

I

Si on regarde le monde avec des œillères bien franchouillardes, on peut penser que rien ne change, pourtant tout s’accélère.

D’abord avec le dérèglement climatique qui va multiplier les mouvements de population, même en France, et impacte déjà tout le secteur de l’Assurance.

Mais surtout avec le chaos géopolitique que Poutine a déclenché avec l’invasion de l’Ukraine. Il a ouvert la jarre de Pandore.

Face à ces deux fléaux, choc climatique et guerre, comment Macron réagit-il ?

Il n’est pas avare de discours sur l’écologie dans lesquels les milliards pleuvent pour la biodiversité, l’isolation des logements, la voiture électrique, le contrôle de l’artificialisation des terres…

Mais en réalité, seule la relance du nucléaire est envisagée.

En revanche, la matraque est utilisée sans ménagement à Sainte Soline et il tente vainement de dissoudre les Soulèvements de la terre. L’écoterrorisme devient l’ennemi.

Lors de la récente crise agricole, quelques centaines de tracteurs ont suffi pour lui faire abandonner les timides mesures de contrôle des produits phytosanitaires et libérer les autorisations pour multiplier les bassines qui privatisent l’eau, un bien commun, en artificialisant les sols.

De plus, la récente loi sur l’agrovoltaïsme va permettre de couvrir des hectares de surfaces agricoles de panneaux solaires. La FNSEA, dont l’origine remonte à Pétain, qui cogère avec l’État l’agriculture, est sortie renforcée d’un mouvement qu’elle n’avait pas déclenché. Macron a vite révisé ses velléités écolos.

Quant à la guerre… Macron a déclaré que nous étions en économie de guerre.

Sachons raison garder.

Certes, l’industrie d’armement (165 000 emplois) est un des secteurs vraiment performants, au point où la France est devenue le deuxième pays exportateur d’armes.

Par exemple, le canon Caesar souvent présenté comme un fleuron de cette industrie, produit par KNDS (ex Nexter, ex GIAT) fabriqué au rythme de 6 par mois, doit passer à 12 par mois.

C’est une entreprise franco-allemande qui regroupe des établissements employant 4500 salariés. Or, l’embauche est régie par des procédures très strictes : casier judiciaire vierge, enquête de la gendarmerie… pas comme celles d’un supermarché !

Par ailleurs, un canon sans munitions c’est un couteau sans lame. Or là, le bât blesse. Aux Forges de Tarbes qui fabriquent les corps d’obus de 155 mm, ceux du Caesar, un conflit social  a mis à l’arrêt l’usine pendant plusieurs mois, la CGT reprochant à l’employeur Europlasma un manque d’investissement. Les carnets de commande sont pleins mais la  production n’a repris que récemment. Quant à l’explosif, Macron vient d’inaugurer la poudrerie de Bergerac fermée depuis 2007.

On est donc bien loin de l’économie de guerre. On assiste avant tout à un effet d’aubaine permettant de booster le secteur.

Alors Macron chef de guerre tançant les pays européens qui n’en feraient pas assez pour l’Ukraine :

  • Allemagne : 17,7 Md €
  • Danemark :   9,1 Md € (5,8 millions d’habitants)
  • Pays-Bas  :   4,4 Md € (17 millions d’habitants)
  • France      :   1,8 Md €

Les pays du Nord et de la Baltique envoient des armes et Macron prononce des discours !

Le principal exploit de Macron, chef de guerre, fut le rappel des troupes du Mali, du Niger.

II

Macron tient grâce aux subtilités des institutions de la Vème République.

Pour éviter une motion de censure sur la question de la Dette  que voteraient les Républicains, ce qui ferait chuter le gouvernement, un simple débat aura lieu à l’Assemblée Nationale le 29 avril.

Sa fin de mandat semble vouée à l’immobilisme vu son absence de majorité. Néanmoins, cornaqué par la droite, il  peut porter des coups sévères aux plus faibles comme avec la loi sur l’immigration. Alors que son impopularité est patente, qu’est-ce qui pourrait le faire choir ?

En tout cas, il n’a rien à craindre des oppositions de droite comme de gauche, lesquelles n’envisagent comme objectif politique que l’élection présidentielle se soumettant de fait aux institutions de la Vème République.

Mélenchon, pourfendeur de ces institutions, avance la perspective d’une Assemblée Constituante. Comment ? Une fois élu président de la République, il convoquerait une Assemblée Constituante pour la VIème République. Le 16 mars, il déclare :

Oui, on a le droit de dire que l’élection européenne de 2024 prépare l’élection présidentielle de 2027… Il faut bien commencer et ça commence aujourd’hui”.

Manon Aubry, tête de liste de LFI aux européennes, enchaîne : “… l’après Macron commence dès le 9 juin”.

Ne serait-ce pas un peu présomptueux au regard des intentions de vote ? Mélenchon en 2012, non sans malice, avait affublé Hollande du titre de “capitaine de pédalo”. Pour l’instant, il serait plutôt skipper d’un voilier sur le bassin des Tuileries, près du Sénat, où il siégea longtemps.

III

Qu’est-ce qui pourrait vraiment ébranler Macron ?

Le récent mouvement des agriculteurs doit attirer notre attention, malgré la grande disparité du spectre agricole allant du céréalier avec des centaines d’hectares cultivés pour des agrocarburants au petit éleveur qui vend à la ferme et au marché local.

Constatant le recul rapide de Macron, un enseignant dépité déclarait : “Pour se faire entendre, il faudrait acheter des tracteurs !” Certes, avec des tracteurs on bloque les routes, les préfectures, avec la mansuétude des forces de l’ordre. En revanche, Macron les a fait intervenir quand les tracteurs montaient sur Paris en interdisant le passage des ponts de Loire. De même, il a été fort marri des bousculades qui ont perturbé sa visite au Salon de l’Agriculture.

En effet, ne faudrait-il pas tirer les leçons des mouvements récents, ce à quoi s’essaie Philippe Poutou dans “Le Monde Diplomatique” au sujet de la bataille des retraites. Sa conclusion est double : il faudrait des luttes sous des formes plus radicales et pas uniquement défensives (retrait de la réforme)  mais offensives (le 100 % sécu, le salaire à vie…). Les prémisses de son raisonnement sont que les conditions étaient réunies pour réussir : “Cette fois, c’est différent : les appels à bloquer le pays, les encouragements à la grève reconductible ont bien été lancés”.

Tout aurait donc été tenté.

Pas vraiment, non en termes de luttes mais en termes d’objectif politique. A aucun moment il n‘a été question d’un ou deux jours de vraie grève générale avec montée sur Paris pour défier Macron au lieu des promenades autour des préfectures et de l’appui aux “bons” députés. Alors Macron aurait eu vraiment peur. Comme lors des premiers samedis des Gilets Jaunes quand, dans les gares des petites villes de province, les gendarmes,  à 6 heures du matin, vérifiaient le contenu des sacs des voyageurs pour Paris.

Macron jusqu’à quand ?

Bien sûr, la lutte des classes en décidera car toutes les forces politiques le laisseront tranquille.

Mais comment Balzac aurait-il imaginé la fin d’un Rastignac amiénois ?

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