“Jamais les dépenses militaires n’avaient autant progressé d’une année sur l’autre : +6,8% par rapport à 2022 à 2 443 milliards de dollars (…). Il s’agit de la plus forte augmentation depuis 2009 et du plus haut niveau jamais atteint par les budgets militaires dans le monde, souligne Stockholm Institute for Peace (SIPRI).”
Le Figaro indique que l’augmentation des budgets “défense” répond aux conflits en Ukraine et au Moyen-Orient, sans oublier la montée des tensions militaires en Asie… au total, précise les Nations Unies”, quelque 55 conflits sont à l’œuvre sur la planète avec des affrontements qui s’intensifient !”
Les principaux pays en “paix” se préparent à la guerre. En Europe, malgré des divergences entre certains pays, l’OTAN se renforce sous contrôle américain, en achetant plus de 60% des armes… aux USA. L’industrie militaire est un véritable volant d’entraînement économique.
L’impérialisme US est bien sûr en tête avec 916 milliards de dollars consacrés à la “défense”, alors que la Chine affiche un budget de 296 milliards… En réalité, cette montée des périls est le produit direct d’une impitoyable concurrence mondiale. Chaque pays défend “son” marché, cherche à en conquérir d’autres. La “guerre économique” atteint maintenant des sommets. L’impérialisme, notait Trotsky, c’est l’explosion des forces productives hors du territoire national. Ainsi, les Américains s’inquiètent de la “route de la soie” et des surproductions chinoises dans de nombreux domaines qui lui permettent de “casser les prix”, d’inonder les marchés comme dans l’automobile électrique.
Le numéro 1 mondial affronte le numéro 2 : c’est un très gros morceau.
Mais la guerre peut également éclater pour des raisons proprement politiques. C’est évidemment le cas en Ukraine, à Gaza…
Certes, Poutine souhaite récupérer le marché ukrainien, mais l’invasion a pour premier objectif de restaurer la puissance de “L’Empire”, rayer de la carte l’Ukraine comme la Crimée, face à l’OTAN qui encercle la Russie.
De même, la guerre à Gaza, en Cisjordanie et à Jérusalem, a été déclenchée par l’attaque barbare du 7 octobre mais s’inscrit dans la politique israélienne pour expulser les Palestiniens de leur terre dès 1948.
Dans ces deux conflits, les forces et les faiblesses américaines sont spectaculaires.
Sans les armes américaines, ni l’Ukraine ni Tel Aviv ne pourraient faire face.
Mais, malgré sa puissance militaire, l’impérialisme américain n’est plus le gendarme incontesté du monde. Il l’était lorsqu’il partageait cette charge avec… la bureaucratie stalinienne soviétique dans la mise en œuvre de la “coexistence pacifique”. Ce n’est plus le cas, d’autant que : la lutte des classes internationale, la mobilisation des peuples ont, souvent, contraint les américains à reculer. Il en fut notamment ainsi au Vietnam, en Iran, en Libye, Afghanistan…
Récemment, les Américains, paniqués, se sont enfuis de Kaboul, abandonnant leurs alliés… L’instabilité fracture les USA. Au-delà du choc entre Biden et Trump, c’est toute la société américaine qui est divisée… fragmentée.
Face à Netanyahou, Biden donne de violents coups de volant dans tous les sens, le menaçant de stopper les approvisionnements militaires sans le faire vraiment. Il cherche un accord, quasi-impossible entre Israël, le Hamas et le Hezbollah, craignant un embrasement régional. Pour l’heure, il ne parvient pas à l’obtenir. Répétons-le : pour les Etats-Unis, l’ennemi premier c’est la Chine.
Depuis le 7 octobre, Israël craint pour sa… survie.
De fait, Tsahal a d’ores et déjà perdu la guerre à Gaza malgré sa puissance, les destructions, les massacres… Netanyahou, le barbare, provoque l’Iran pour échapper… à la prison, allumer une guerre régionale qui menacerait les Emirats, l’Egypte, la Jordanie etc. Pour les Américains comme les Européens, cette stratégie est irresponsable.
La période de relative stabilité des relations internationales a vécu. Sans oublier, des bulles financières qui menacent d’éclater. À certains égards, le panorama général fait penser à la situation des années… 1914. Un dérapage peut provoquer, par le jeu des alliances, un embrasement général.
Ce sont ces problèmes auxquels il faut réfléchir. Quelle politique préconiser alors que la “guerre est revenue” menaçant l’Europe et l’Asie ? Comment traduire aujourd’hui le “défaitisme révolutionnaire” ? La mobilisation de la jeunesse aux Etats-Unis contre les livraisons d’armes à Israël, politique parfaitement juste, doit nous faire réfléchir à la lutte contre l’OTAN. La définition d’une politique contre la militarisation économique et politique du monde est indispensable.
C’est dans ces conditions que le “petit” impérialisme français aborde la situation : la France, grand malade de l’Europe.
Paniqué par le résultat des élections européennes, Macron a dissout l’Assemblée Nationale ! Une décision politique folle pour sa majorité et la bourgeoisie dans son ensemble. La classe politique, unanime, a dénoncé cette décision.
Juché sur un cheval qui claudique, le petit Bonaparte, dorénavant, est seul. À la merci d’une victoire du parti d’extrême-droite et dans tous les cas, avec une Assemblée sans véritable majorité… ingouvernable ! Macron est lâché par les siens.
Il est fou, répètent les journalistes du Capital. Au lendemain du second tour, après la catastrophe, les médias se déchaîneront. C’est dans ces circonstances qu’en quelques jours, PS, LFI, Écologistes, PC, Place Publique ont construit un cartel politique, le Nouveau Front Populaire. Soyons clair : la victoire était possible. Le NFP pourrait submerger, battre Macronistes, LR et RN !
Il fallait déclencher une mobilisation politique unitaire, de masse !… Agir pour faire élire le candidat unique dans chaque circonscription.
Cette mobilisation des salariés, des exploités, des déclassés angoissés, des chômeurs, de la jeunesse pouvait l’emporter.
Jean-Luc Mélenchon ne l’a pas voulu. Il a saboté, multiplié les incidents, les provocations. Il a agi avec une rare brutalité pour interdire ce résultat.
1. Il a d’abord éjecté les députés sortants, anciens fondateurs de LFI, en désaccord avec lui ! Le mouvement “gazeux” a un chef. Un seul. Lui. Cet objectif nie l’exercice de la démocratie.
2. Il a engagé une campagne de calomnie contre ses anciens camarades : Ruffin, Clémentine Autain, etc… qui refusent de le rallier. Présenté contre les exclus des candidats systématiquement choisis dans la “diversité”. Ainsi, ceux qui refusent cette saloperie sont taxés de racisme !
3. Jean-Luc Mélenchon, est-il antisémite ? Non, probablement pas. Ses acolytes, ça se discute… Le 7 octobre, un pogrom terroriste a assassiné 1 200 citoyens israéliens, femmes, enfants, vieillards… Des civils saisis comme otages. Évidemment, il convenait de dénoncer cet acte de barbarie dont la première conséquence a été de réaliser l’union nationale autour du gouvernement fasciste de Netanyahou, alors que des millions d’Israéliens avaient manifesté contre lui à la veille de l’agression. À Gaza, en Cisjordanie, à Jérusalem-est, la barbarie est à l’ordre du jour : Israël massacre à tout va. Près de 40 000 morts, dont des milliers d’enfants ! annonce le Hamas, plus d’une centaine de journalistes tués, dénonce l’ONU… !
C’est la pire barbarie. Mais – heureusement – ce n’est pas un génocide. Ce n’est pas la même chose. Les mots ont un sens. Tsahal n’a pas pour objectif de liquider le peuple palestinien mais de profiter du combat contre le Hamas pour tuer un maximum de Palestiniens. C’est différent. D’autant que le Hamas et le Hezbollah défendent chèrement leur peau.
Au total, ce sont des actes ignobles, barbares, des crimes de guerre, mais pas un génocide.
Il faudrait être plus long : rappeler l’importance historique des manifestations, tous les samedis dans la plupart des villes israéliennes, contre le gouvernement Netanyahou, pour un accord avec le Hamas, la libération des otages. En réalité, ni le gouvernement israélien, ni les dirigeants du Hamas, n’en veulent… Les USA s’avèrent, pour l’heure, incapables d’imposer un accord. Le soutien au peuple palestinien s’impose, va de soi pour des internationalistes. Mais ce soutien doit-il s’appliquer au Hamas, au Djihad Islamiste ?
Non. Tranquillement, non.
Nous avons appris de l’histoire. Ainsi, l’avant-garde, tous courants confondus, a soutenu qui le FLN, qui le MNA en Algérie. C’était une erreur. Il fallait évidemment dénoncer, combattre le colonialisme français, manifester sa solidarité active avec le peuple algérien. Mais ce combat n’impliquait pas le soutien, l’alignement sur des organisations fondamentalistes islamistes, combattant en tuant pêle-mêle colons, partisans de l’Algérie française et de l’Algérie algérienne, dressant les uns contre les autres. Nous n’avions pas à soutenir le FLN, sa politique, son affirmation islamiste. Une autre politique était possible.
Ainsi, pendant la Seconde Guerre Mondiale, les trotskystes ont, en Bretagne, résisté en créant un journal franco-allemand “Arbeiter und Soldat”, rassemblant militants – soldats – anti-fascistes allemands et français ! La plupart furent emprisonnés, fusillés. Mais cette politique fut l’honneur des militants de la IVe Internationale. Aujourd’hui, soutenir les organisations fondamentalistes qui combattent pour détruire Israël “du Jourdain à la mer”, c’est tourner le dos à une politique internationaliste. Nourrir l’affrontement nationaliste. Développer l’antisémistisme dans le monde entier. Soutenir dans les faits le gouvernement israélien… Le Hamas et Netanyahou sont les meilleurs ennemis !
Jean-Luc Mélenchon et ses camarades ne sont pas antisémites mais, ils approchent… de la frontière, utilisant des formules folles. Ainsi, le leader de LFI dénonce un président d’université qu’il compare à… Eichmann ! Et plus tard, affirme que “l’antisémitisme est un phénomène résiduel” alors que les actes anti-juifs ont augmenté de 1 000 % ! Quelques jours après cette déclaration, une petite fille juive été violée par des jeunes antisémites… En soutenant des groupes ouvertement antisémites, Jean-Luc Mélenchon et ses camarades se déconsidèrent politiquement, frisent le pire. Ainsi, des candidats LFI “confondent” lutter contre la politique de Netanyahou et tous les israéliens y compris des millions d’opposants ! Un de leur candidat a dû être démis: il envoyait des messages antisémites… Quant aux alliés de LFI, c’est dramatique.
Exagération ?
Houria Bouteldja, fondatrice du Parti des indigènes de la République, écrit à propos des cinq exclusions de députés LFI sortant.
“Je me refuse à parler de purge. Je préfère la formule de “stratégie post-législatives”. Car il s’agit de députés de l’aide droite et ultra-laïcarde de la LFI, celle qui est prête à prendre langue avec les ennemis !”
Stupéfiant. Et félicitations pour les militants du POI qui mettent en oeuvre cette alliance avec la racaille antisémite, fondamentaliste, la plus réactionnaire…
Ces graines de fascistes soutiennent Jean-Luc Mélenchon comme les suprématistes américains soutiennent Trump et Israël ! Il y a quelques mois, Robert Duguet nous avait éclairé sur cette dérive digne des néo-socialistes d’avant-guerre.
Toute cette lie n’a rien à voir avec le mouvement ouvrier. La réalité c’est que Jean-Luc Mélenchon ne veut pas que le Nouveau Front Populaire l’emporte. Il serait alors menacé d’être marginalisé. Il est donc intervenu pour proposer à nouveau sa candidature à… Matignon, suscitant colère et réplique des autres partis de la NFP, brisant le cadre unitaire ! C’est lamentable.
Aujourd’hui, le leader de LFI est rejeté par une partie de l’électorat de gauche. Il s’en moque : Jean-Luc Mélenchon ne s’intéresse qu’à 2027, l’élection présidentielle.
Au lendemain des législatives, dans le chaos annoncé, le cartel politique “NFP” implosera. Cela aurait pu être, dû être, un cadre unitaire de mobilisation contre l’extrême-droite. Ce ne sera pas le cas. Il faudra, dans l’action, recréer l’unité sur d’autres bases pour combattre le poison d’extrême-droite.
Cette situation illustre une crise d’une ampleur nouvelle. Des affrontements inévitables.
De ces problèmes, nous discutons régulièrement en Zoom et en présence. Ainsi, nous débattons avec les camarades d’Aplutsoc, comme eux avec nous. C’est bien.
Ce qui serait positif, c’est que ces échanges se poursuivent également en commun avec les militants du PEPS et ceux, par exemple, de la Commission Internationale du NPA… Il faut jouer la démocratie, le débat à fond.
À 103 ans (!), Edgar Morin vient de publier un livre titré “S’il est minuit dans le siècle”, sous-titré : “La première et fondamentale résistance est celle de l’esprit.”
L’emprunt au livre de Victor Serge, publié à la veille de la Seconde Guerre Mondiale, fait sens. Hitler, Mussolini, Franco, Salazar, dominaient l’Europe, tandis que Staline avait écrasé dans le sang, l’opposition en URSS et dans l’Internationale. Partout, les salariés étaient battus.
La nuit étant tombée sur le monde. La Seconde Guerre Mondiale allait éclater.
Edgar Morin poursuit :
“Nous allons vers de probables catastrophes. Est-ce le catastrophisme ?
Ce mot exorcise le mal et donne une sérénité illusoire. La polycrise que nous vivons sur toute la planète est une crise anthropologique : c’est la crise de l’humanité qui n’arrive pas à devenir Humanité. (…) Les tunnels ne sont pas interminables, le probable n’est pas certain, l’inattendu est toujours possible.”
Quelle lucidité. L’essentiel est dit. “L’inattendu est, en effet, toujours possible.”
Ce sont ces problèmes qu’il faut, entre autres, débroussailler. C’est sur ces questions qu’il faut travailler. Il faut débattre, camarades, faire vivre la démocratie ! Notre regroupement qui n’est surtout pas un groupe avec ses chefaillons, ses statuts, a cet objectif. C’est notre responsabilité.
Charles Jérémie