L’affaire David Hogg (voir corps de l’article), la victoire de Zohran Mamdani et l’avenir de la coalition démocrate.
- David Austin Walsh pour Boston Review
26 JUIN 2025
Le Parti démocrate est en crise, et cela va bien au-delà des gros titres stéréotypés sur le « désarroi des démocrates ». La popularité du parti est au plus bas : un sondage réalisé en mars par NBC News a révélé que seuls 27 % des électeurs inscrits ont une opinion favorable des démocrates, le taux le plus bas depuis le début du sondage en 1990. D’autres sondages ont révélé que le taux d’approbation des démocrates au Congrès est au plus bas parmi les électeurs démocrates, avec seulement un tiers environ se déclarant satisfait de la performance des démocrates au Capitole. (En revanche, près de 80 % des républicains approuvent le travail du GOP au Congrès.) Même les grands donateurs commencent à serrer les cordons de leur bourse.
Un bon exemple de la gravité de la crise : le samedi 14 juin, environ 5 millions de personnes à travers le pays ont participé aux manifestations anti-Trump « No Kings ». Il s’agit de l’une des plus grandes manifestations de l’histoire des États-Unis, qui a mobilisé entre 1 et 2 % de la population américaine dans les rues. Il existe clairement un élan politique anti-MAGA à travers le pays, et pourtant, le dernier sondage Quinnipiac University révèle que 53 % des démocrates désapprouvent la manière dont le Parti démocrate agit au Congrès. Le taux de popularité du leader de la minorité au Sénat, Chuck Schumer, oscille notamment autour de 17 %, et compte tenu de son « soutien oral » aux frappes israéliennes contre l’Iran, ce chiffre ne devrait que chuter davantage.
Et puis, il y a Zohran Mamdani.
Sa victoire décisive mardi lors des primaires à la mairie de New York contre Andrew Cuomo, ancien gouverneur et fils d’un ancien gouverneur, souligne à quel point les démocrates sont enfin arrivés à leur moment Tea Party : les électeurs, lassés de l’inefficacité, de la corruption et du népotisme d’un Parti démocrate vidé de sa substance, ont exprimé leur mécontentement lors de la course la plus médiatisée de 2025, malgré un torrent de critiques et de propagande nationale de la part de l’establishment. Bien qu’il doive désormais affronter un autre obstacle lors des élections générales de cet automne, il y a de très bonnes chances qu’un socialiste démocrate musulman pro-palestinien de 33 ans devienne le prochain maire de la plus grande ville d’Amérique, remplaçant ainsi le démocrate discrédité et ancien capitaine de la police new-yorkaise Eric Adams.
Comment en sommes-nous arrivés là ?
Les électeurs démocrates sont furieux contre la direction de leur parti, qui n’a pas tenu ses promesses de l’année dernière, lorsque des démocrates de haut rang ont qualifié Trump de fasciste et de menace pour la démocratie américaine. Ces démocrates avaient raison, comme le confirme le déploiement, au début du mois, de la Garde nationale et de marines en service actif à Los Angeles pour réprimer des manifestations largement pacifiques contre l’ICE. Mais alors que des hommes masqués, lourdement armés et non identifiés arrêtent des gens dans la rue et que des agents fédéraux jettent des sénateurs démocrates à terre pour avoir assisté à des conférences de presse, ces mêmes dirigeants sont soit introuvables (Kamala Harris), soit se contentent de déclarations timides (Schumer : « nous avons besoin de réponses immédiates sur ce qui s’est passé »). La gauche, quant à elle, reste furieuse du soutien apporté par l’establishment au génocide de Gaza. Et le parti est encore sous le choc de la décision catastrophique de Joe Biden de se présenter à sa réélection malgré son incapacité physique et mentale.
Une partie du problème pour les démocrates est qu’il y a peu de consensus sur ce que le parti représente exactement en termes de politique concrète, au-delà du soutien inconditionnel à Israël, d’une certaine attention au changement climatique et d’engagements vaguement définis en faveur de l’égalité raciale, de genre et de sexualité (sans parler du soutien de l’establishment à Cuomo après sa démission suite à des accusations de harcèlement sexuel). Les experts libéraux Ezra Klein et Derek Thompson ont tenté de définir un programme plus affirmatif, intitulé « Abundance » (Abondance), dans leur récent ouvrage du même nom. Toute vision positive pour le Parti démocrate devrait certainement inclure l’expansion de la capacité de l’État à agir, mais, comme Sandeep Vaheesan l’a fait valoir dans ces pages le mois dernier, la pensée de Klein et Thompson reste structurée à bien des égards par le néolibéralisme, et de toute façon, une grande partie de la force politique réelle du « programme d’abondance » est « astroturfée » par de riches donateurs de la Silicon Valley.( dépendante de..)
C’est peut-être la raison pour laquelle l' »Abondance » a occupé une place si importante au WelcomeFest, le « plus grand rassemblement public de démocrates centristes » qui s’est tenu au début du mois. Parmi les intervenants figuraient Andrew Rotherham, un important dirigeant d’une organisation à but non lucratif qui a réprimandé les démocrates de Floride pour s’être opposés au projet de loi « Don’t Say Gay » de Ron DeSantis ; le blogueur et conseiller de la Maison Blanche de Biden, Matthew Yglesias, qui a reproché aux « groupes » (son terme préféré pour désigner les organisations progressistes qui cherchent à influencer la politique du parti) les difficultés électorales des démocrates ; et l’économiste Josh Barro, qui a déclaré sans ambages dans une interview avec le député new-yorkais Ritchie Torres que « quand je regarde les politiques new-yorkaises qui font obstacle à l’Abondance… si vous regardez sous le capot, vous finissez toujours par trouver un syndicat ».
Un autre facteur clé de l’implosion de l’establishment démocrate est qu’il s’est une fois de plus révélé incapable de mener à bien une réforme interne majeure. David Hogg, militant libéral de 25 ans, élu en février à l’une des cinq vice-présidences du Comité national démocrate (DNC), a déclaré qu’il ne se représenterait pas après le vote à une écrasante majorité, au début du mois, en faveur de la tenue de nouvelles élections à la vice-présidence pour des raisons purement procédurales.
Les ennuis ont commencé en avril, lorsque Hogg a annoncé son intention d’utiliser son comité d’action politique, Leaders We Deserve, pour soutenir les jeunes progressistes qui se présentaient aux primaires contre des démocrates « déconnectés et inefficaces » dans des circonscriptions électorales sûres. Les démocrates sont depuis longtemps confrontés à un problème de gérontocratie : même avec la récente ascension de jeunes leaders comme le chef de la minorité Hakeem Jeffries, âgé de 54 ans, l’âge moyen des dirigeants démocrates à la Chambre reste de 72 ans. (La moyenne chez les dirigeants républicains, en revanche, est de quarante-huit ans.) L’initiative de Hogg était l’un des premiers programmes sérieux au sein de l’appareil du Parti démocrate à prendre ce problème au sérieux, ainsi que le problème connexe des démocrates dans les circonscriptions sûres et profondément bleues qui se contentent essentiellement de téléphoner depuis leur confortable siège de député d’arrière-ban.
Le président du DNC (Comité national démocrate), Ken Martin, conteste que la tentative de refonte des élections à la vice-présidence soit une mesure de rétorsion contre les attaques de Hogg contre les élus complaisants. Mais allons. Dans une conversation divulguée à Politico, Martin s’est plaint que Hogg avait « essentiellement détruit toute chance » qu’il avait de s’imposer comme le chef du DNC et l’avait empêché de lever les fonds nécessaires pour asseoir sa crédibilité. De son côté, Hogg a mis tout le poids de son comité d’action politique dans une élection spéciale visant à remplacer le siège de Gerry Connolly, décédé récemment, en Virginie du Nord. Il a apporté son soutien à Irene Shin, une membre de la Chambre des délégués de Virginie âgée de 37 ans qui affiche un parcours politique modérément centriste, notamment un passage en tant que directrice financière de la campagne sénatoriale de Kamala Harris.
Jusqu’à récemment, Hogg ne présentait guère les signes d’un radicalisme politique anti-establishment. Il s’est fait connaître au niveau national alors qu’il était encore lycéen, après avoir survécu à la fusillade de Parkland en février 2018, devenant rapidement le visage du mouvement progressiste pour le contrôle des armes à feu. Un mois plus tard, il a coorganisé les manifestations March for Our Lives, issues de la vague de protestation libérale de gauche qui avait suivi la Marche des femmes l’année précédente. Il a fait la couverture du magazine Time aux côtés d’autres étudiants organisateurs et a été inclus dans la liste des 100 personnes les plus influentes de l’année. Il a écrit un livre à succès sur la fusillade et l’organisation étudiante puis s’est inscrit à Harvard en 2019.
En bref, Hogg était extrêmement bien placé pour faire carrière dans la politique démocrate libérale traditionnelle. Il a même tweeté en juin 2018 : « J’aime le capitalisme ». (Il a démissionné de March for Our Lives en février 2021, au moment où il lançait une entreprise commerciale malheureuse avec un entrepreneur technologique pour créer une société de coussins (oreillers) destinée à concurrencer MyPillow, l’entreprise de Mike Lindell, un partisan de Trump).
Les engagements politiques de Hogg n’ont rien de particulièrement remarquables. Jusqu’au lancement de Leaders We Deserve, il n’avait jamais critiqué sérieusement le parti ou ses dirigeants, si ce n’est pour dénoncer le bilan de certains démocrates en matière de contrôle des armes à feu. En d’autres termes, il a bâti sa carrière en affichant sa loyauté envers les démocrates, en rejetant les critiques de la gauche concernant la corruption du parti par les entreprises et en refusant de soutenir Bernie Sanders ou Elizabeth Warren lors des primaires de 2020. Les gens peuvent changer d’avis, bien sûr – on souhaiterait certainement que davantage le fassent après avoir vu de près, de l’intérieur, comment fonctionne le parti. Mais même aujourd’hui, le PAC de Hogg ne soutient aucun programme politique spécifique et ne fait aucune mention sur son site web de propositions de réforme substantielles pour le parti, au-delà de la candidature de jeunes. Depuis qu’il a déclaré qu’il ne se présenterait pas à nouveau à la vice-présidence, il s’est déplacé vers la gauche, soutenant Mamdani – mais, répétons-le, seulement après avoir renoncé à tenter d’initier une réforme depuis une position au sein de la direction du parti.
Pourquoi alors, étant donné que la vision de Hogg pour le Parti démocrate lorsqu’il était au DNC était facilement conciliable avec celle des centristes du WelcomeFest, Liam Kerr, cofondateur du PAC qui organise la conférence, a-t-il mené une campagne de terre brûlée contre Hogg sur son Substack ?
Une partie de la réponse réside dans le fait que Hogg doit, dans une large mesure, sa carrière politique à ce que le philosophe Olúfẹ́mi Táíwò a appelé la « politique de la déférence ». Ce phénomène est né d’une certaine tendance des pratiques organisationnelles de gauche dans les années 2010 et il s’est répandu dans les milieux libéraux où ont fleuri des idées telles que les « piles progressistes » et la « centralisation » des personnes appartenant à des groupes marginalisés. Dans sa forme la plus forte, note Táíwò, la politique de déférence ne se contente pas d’encourager à passer le micro aux représentants des communautés opprimées. Elle promeut une culture où la critique des opinions de ces représentants est considérée avec une suspicion réflexe, signe d’un refus obstiné de s’en remettre à ceux qui savent mieux.
Un autre problème, souligne Táíwò, est que les personnes qui peuplent les organisations militantes influentes et les couloirs du pouvoir sont rarement les membres typiques des groupes qu’elles prétendent représenter. La politique de déférence est donc victime de la « capture par l’élite », c’est-à-dire « le contrôle des programmes politiques et des ressources par les personnes les plus favorisées d’un groupe ». Hogg est un jeune homme blanc issu de la classe moyenne, et les jeunes hommes blancs issus de la classe moyenne ne sont guère marginalisés en tant que groupe dans la société américaine. Mais Hogg est également un survivant de la violence armée et a bénéficié de la déférence à ce titre en tant que jeune militant.
Les discours centristes sur « les groupes » passent à côté du cas le plus significatif de la politique de déférence des élites : celle pratiquée par l’establishment du parti lui-même.
Selon les détracteurs de « The Groups », la politique de déférence et la capture des élites sont au cœur des problèmes du Parti démocrate, conduisant à l’ascension d’activistes politiquement marginaux qui aliènent les majorités soit en tenant des propos très impopulaires, soit en obtenant des concessions politiques impopulaires. Le sociologue Musa al-Gharbi a défendu cette thèse avec force dans son ouvrage We Have Never Been Woke, publié l’année dernière, qui a été salué par David Brooks, Thomas Chatterton Williams et Geoff Shullenberger, entre autres. Mais ce que la carrière de Hogg – et son éviction imminente du DNC – soulignent, c’est que le « réveil » d’al-Gharbi et la « politique de déférence » de Táíwò existent en lien étroit avec une autre forme beaucoup plus insidieuse de politique de déférence : la déférence envers l’autorité, la hiérarchie et le pouvoir, souvent mobilisée à travers le discours de la lutte contre l’oppression ou la marginalisation. Cela a pour effet de renforcer le problème de l’impunité des élites.
Bien sûr, cette forme de déférence envers les élites imprègne la politique démocrate depuis longtemps, et je ne suis pas le premier à le souligner – les penseurs socialistes le disent depuis des années. Au cours de la dernière décennie, cette politique n’a fait que s’intensifier en réaction à une contestation de plus en plus importante de la part de la gauche populiste. Le culte de la personnalité qui s’est développé autour de Ruth Bader Ginsburg, que Dahlia Litwick a qualifié de « indispensable » à la Cour suprême en 2014, alors que des voix s’élevaient pour demander sa retraite afin de préserver un siège libéral à la Cour, en est un exemple frappant. Les défenseurs de Ginsburg ont insisté sur le fait que ses détracteurs étaient sexistes, âgistes et ingrats en demandant à cette icône féministe de se retirer – une ligne de défense qui n’a pas bien vieilli après sa mort et son remplacement par Amy Coney Barrett, l’une des voix clés dans la décision Dobbs qui a annulé Roe v. Wade.
La politique de déférence envers l’élite engendre un sentiment de droit acquis chez les élites politiques, souvent défendu par des appels explicites à l’identité. C’était l’un des arguments principaux de la candidature d’Hillary Clinton à la présidence en 2016 – c’était au tour de Clinton d’être présidente après Obama, disait-on – et cela a attisé la fureur de nombreux partisans de Clinton contre la candidature de Sanders. L’antipathie de la gauche pour Clinton a d’abord été rejetée comme de la misogynie de la part des « Bernie Bros », puis comme du racisme, un refus d’écouter les électeurs noirs lors des primaires. Plus tard, en 2020, les inquiétudes concernant l’âge et l’aptitude de Biden à la présidence ont été balayées – même par ceux qui avaient exprimé des inquiétudes similaires à propos de Sanders – une fois de plus sous prétexte d’âgisme. Le fait est que les discours centristes sur « les groupes » passent à côté du cas le plus significatif de la politique de déférence des élites. La forme pratiquée par l’establishment du parti lui-même est beaucoup plus responsable de la situation difficile dans laquelle se trouve le parti en 2025 que les organisations à but non lucratif œuvrant pour la justice environnementale et raciale.
La controverse déclenchée par la publication du récent livre de Jake Tapper et Alex Thompson, Original Sin, une dissection journalistique classique de la décision de Biden de se présenter pour un second mandat, souligne ce point. Si l’on en croit ces révélations, le Parti démocrate – en réalité l’establishment libéral américain dans son ensemble – s’est livré à une conspiration délibérée pour dissimuler, minimiser et nier l’étendue de l’incapacité mentale et physique de Biden, qui a culminé avec sa performance désastreuse lors du débat contre Trump en juin 2024. Il s’agit d’un scandale de la plus haute gravité, qui met en cause non seulement Biden lui-même, mais aussi sa famille, ses proches conseillers, les hauts dirigeants du Parti démocrate et de nombreuses personnalités des médias, dont Tapper et Thompson eux-mêmes. (Comme beaucoup de journalistes d’élite, ils ont manifestement choisi de taire une information politique cruciale jusqu’ après les élections afin de vendre leurs livres).
Le livre dénonce également comme fondamentalement creuses les affirmations du Parti démocrate à propos de Trump, selon lesquelles il serait moralement et mentalement inapte à exercer ses fonctions et serait un menteur narcissique. Selon Tapper et Thompson, Biden était mentalement inapte à exercer ses fonctions, incapable d’accepter son déclin en raison de son narcissisme, et a activement trompé le public jusqu’à ce qu’il soit trop tard. Et comme la culture politique libérale contemporaine exige le respect du pouvoir, de l’autorité et des idéaux de compétence technocratique et de méritocratie – comme l’a dit de manière tristement célèbre l’un des collaborateurs de Biden, le président était « juste trop bon » –, l’autorité de Biden n’a pas été sérieusement remise en cause jusqu’à ce que sa performance désastreuse lors du débat mobilise enfin l’élite démocrate contre lui. Et même alors, Biden est resté dans la course pendant près d’un mois !
Dans un livre récent, les politologues Daniel Schlozman et Sam Rosenfeld affirment que les partis démocrate et républicain ont été vidés de leur substance. Selon eux, ces partis sont « lourdement hiérarchisés et peu enracinés » et « dominés par des groupes satellites », de sorte qu’ils « inspirent peu de respect aux électeurs et aux militants ». C’est l’une des principales raisons pour lesquelles Biden a pu se présenter à sa réélection et pourquoi il lui a fallu autant de temps pour se retirer de la course après le débat fatidique avec Trump l’année dernière. Mais les responsables de ce vide sont différents pour les deux partis, affirment Schlozman et Rosenfeld. Le Parti républicain a été « poussé vers le radicalisme » par les « acteurs engagés » du mouvement conservateur américain, qui a culminé avec le culte de la personnalité de Trump. Les démocrates, quant à eux, ont été « rendus apathiques par des acteurs conflictuels », c’est-à-dire par les défis inhérents au maintien d’une coalition au sein d’un parti historiquement engagé en faveur de la classe ouvrière sur le plan politique et économique, avec l’émergence de nouveaux groupes professionnels et d’entreprises puissants.
La purge de Hoggs suggère une limite infranchissable au réformisme interne du parti. Mais les choses changent, et Mamdani montre la voie à suivre.
Le problème avec cette histoire est que les démocrates sont également en proie à des cultes de la personnalité, un aspect clé de la politique de déférence des élites. Il suffit de penser à la révérence durable dont bénéficie Barack Obama, dont la présidence a accéléré le vidage du parti et a abouti à l’élection de Trump, mais qui, comme Harris, a désormais pratiquement renoncé à toute place sur la scène nationale alors que le pays glisse de plus en plus vers l’autoritarisme. Avec l’infrastructure du Parti démocrate, telle qu’elle est, qui sert moins à gouverner un parti engagé dans la lutte pour le pouvoir politique qu’à distribuer des faveurs à la classe des consultants, qu’ils aident les candidats à gagner ou à perdre – comme en témoignent les 20 millions de dollars levés pour financer le projet Speaking with American Men, dont la direction comprend un ancien membre de l’équipe de campagne de Biden en 2020 et un ancien membre du Congrès du Texas qui a tenté sans succès de ravir son siège au Sénat à Ted Cruz, il y a peu d’incitations à prendre au sérieux la réussite en politique.
Selon Schlozman et Rosenfeld, une partie importante de la solution pour les démocrates consiste à redonner corps aux organisations et institutions du parti qui sont à l’écoute des organisations de la société civile, en particulier les syndicats. En outre, il est essentiel d’éviter les erreurs commises après l’élection d’Obama, où les partis locaux et régionaux ont été laissés pour compte. Mais l’affaire Hogg – et son virage à gauche qui a suivi – suggère une nouvelle voie pour la coalition démocrate.
D’une part, sa purge semble indiquer une limite stricte au réformisme interne en tant que stratégie au sein du Parti démocrate. Les partisans de Sanders et le mouvement socialiste démocratique dans son ensemble l’ont déjà compris lorsqu’ils ont contesté divers postes de direction du parti et des changements de règles internes sous la première administration Trump – une campagne qui n’a été que partiellement couronnée de succès. Hogg, qui ne fait absolument pas partie de cette aile populiste, a été fêté par l’establishment démocrate jusqu’à ce qu’il remette directement en cause la politique de déférence envers l’élite.
Mais d’un autre côté, les choses sont en train de changer rapidement au sein du DNC. Le dernier président, Jaime Harrison, devait son poste au népotisme et au trafic d’influence : il était le protégé du chef du parti en Caroline du Sud, Jim Clyburn, qui a essentiellement joué le rôle de faiseur de rois lors des primaires de 2020. Ken Martin, en revanche, est l’ancien président du Minnesota Democratic-Farmer-Labor Party (qui a dominé la politique de l’État du Minnesota pendant la dernière génération malgré le virage à droite du Haut-Midwest) et s’est engagé à renforcer les relations du parti avec les syndicats et à le ramener à une stratégie couvrant les cinquante États, renversant ainsi l’obsession croissante pour les messages destinés uniquement aux électeurs des États indécis.
La vision de Martin pour le parti est généralement en contradiction avec celle exprimée lors du WelcomeFest. Les Abundists (partisan du programme Abondance) sont une faction bien organisée et bien financée de la coalition démocrate, qui cherche à réaffirmer une politique favorable aux mégadonateurs et à la Silicon Valley au sein du parti. En d’autres termes, ils représentent la faction de la politique de déférence envers l’élite.
La principale vision concurrente est celle du populisme de gauche (populaire sans la caractérisation péjorative Ndt) : une politique centrée sur la mobilisation politique populaire, le scepticisme à l’égard des grands donateurs, des géants de la technologie et autres monopoles, des revendications explicites en faveur d’une plus forte imposition des riches et un engagement ferme en faveur des biens publics dans les domaines de la santé, de l’éducation et du logement. Sanders, Alexandria Ocasio-Cortez et maintenant Mamdani sont les figures de proue de cette formation.
Hogg a tenté de tirer parti de l’héritage ambigu de la culture militante libérale pendant le premier mandat de Trump, en recherchant un capital social et culturel au sein de l’establishment du parti. Il s’est retrouvé dans une impasse parce que son approche hybride, mêlant déférence et politique élitiste, bien que judicieuse pour servir ses ambitions personnelles, est une stratégie catastrophique pour construire une faction politique efficace. Mais il en a tiré les leçons. Il a apporté son soutien à Zohran Mamdani. Et comme le montre clairement la victoire surprise de Mamdani, c’est là la voie à suivre pour les démocrates et la gauche : une organisation politique populaire solide et ouverte, qui intègre le populisme au lieu de le rejeter et qui répond aux besoins des jeunes générations d’électeurs lassés d’un establishment politique sclérosé.
Il était grand temps.
David Austin Walsh est historien et chroniqueur au Boston Review. Il est l’auteur de Taking America Back: The Conservative Movement and the Far Right.
Traduction Deepl revue ML