Réseau Bastille discussion,discussion-archive Pour ouvrir la discussion, par Robert D. et Charles J.

Pour ouvrir la discussion, par Robert D. et Charles J.

Depuis plus de trois mois, le pays connait une mobilisation sans égale des salariés exigeant le « retrait de la réforme » des retraites.

Depuis plus de trois mois, une unité syndicale sans faille anime ce combat.

Depuis plus de trois mois, des centaines de milliers ont débrayé, des millions ont manifesté et la jeunesse a commencé à rejoindre les cortèges.

C’est donc un événement majeur de la lutte des classes.

Ce mouvement se développe dans un contexte international d’affrontements contre les politiques néo-libérales, alors que l’agression de Poutine contre l’Ukraine a une portée internationale.

Il nous semble donc judicieux de revenir sur les récentes mobilisations de salariés à l’étranger.

En Algérie, durant plusieurs mois, des millions de citoyens, emmenés par les salariés et les chômeurs, ont, chaque semaine, bravé le gouvernement exigeant la fin de la corruption, la restauration des libertés démocratiques. Bouteflika et son gouvernement corrompu ont été « démissionné » au profit d’un remplaçant qui lui… ressemble.

Malgré les millions de manifestants, rien n’a vraiment changé de l’autre côté de la Méditerranée. Grande mobilisation, petite victoire.

En Iran, à l’initiative des femmes, un mouvement magnifique a mobilisé des millions de citoyens contre le gouvernement religieux réactionnaire. Le « guide suprême » a fait mine de reculer mais en fait, tout reste en l’état… Malgré la répression, les morts, le mouvement n’est pas terminé.

En Israël, une mobilisation démocratique de masse historique s’oppose au gouvernement néocolonial d’extrême droite de Netanyahou… Cette mobilisation extraordinaire est en fait limitée dans ses objectifs, mettre en échec la loi judiciaire du gouvernement qui vise à nommer des juges à sa botte. La bataille se poursuit, la victoire n’est pas impossible.

En Angleterre, c’est la première fois depuis Thatcher malgré les lois anti syndicales, que des millions de salariés sont entrés en grève par rafales, arrachant quelques augmentations. Mais le gouvernement maintient sa politique néo-libérale. Le face à face ne fait que commencer.

Nous pourrions ajouter la Tunisie où le Président dictateur reconstruit un état répressif contre les masses.

Aucune mobilisation ne se ressemble sinon que toutes affrontent leur gouvernement. Globalement, le résultat est marqué par l’échec : pas par la défaite.

Revenons à la France.

Il n’y avait pas de nécessité économique à faire cette réforme, comme cela a été souligné par le COR. Lorsque Nicolas Sarkosy a été élu président en mai 2007, le président du MEDEF de l’époque, Geoffroy Roux de Bézieux, fixe le cap : il faut en finir avec le programme « Les jours heureux » du Conseil National de la Résistance, garantissant à tous une retraite décente, une liberté de vivre sans les contraintes de l’exploitation, la sécurité sociale, des services publics, un enseignement de qualité… Le 18 avril 2019, le Medef annonce sa volonté de repousser à 64 ans l’âge légal de départ à la retraite : c’était le mandat de Macron, il y a ajouté un label personnel, là où ses prédécesseurs avaient échoué, il met un acharnement à réussir. Un forcené, qui peut mettre en danger ses commanditaires. 

La puissance du mouvement de lutte des classes s’exprime par des grèves sectorielles souvent minoritaires, « La grève coûte cher », mais des manifestations énormes dans les métropoles comme dans les plus petites villes. La mobilisation demeure considérable malgré la répression policière.

Mais nulle part il n’y a tentative d’auto-organisation. Pas de véritables assemblées générales. Les militants syndicaux organisent, dirigent. 

Force et faiblesse de l’unité syndicale : force de l’unité car cela a permis que des millions d’hommes se mobilisent contre Macron, et pas seulement pour exiger le retrait de la réforme. Faiblesse, non de l’unité, mais de l’accord entre les appareils syndicaux agissant dans le cadre du respect des institutions bonapartistes de la Vème République, renonçant à centraliser ce mouvement là où cela se décide, à l’Élysée.

Il faut s’interroger sur cette situation. En attendant, Macron, avec l’aide du Conseil constitutionnel, a fait passer la réforme. Là encore, c’est un échec pour le mouvement mais pas une défaite. Macron, souligne la presse, a remporté une « victoire à la Pyrrhus ». Son intervention au lendemain de l’adoption de la loi est lamentable. Il a peur. Lorsque le chef de l’État tente le bain de foule comme le 19 avril en Alsace, il est hué, conspué par des manifestants et contraint de renoncer à aller au contact du « peuple » dans la tradition bonapartiste. Minoritaire à l’Assemblée, le pouvoir est d’une extrême fragilité… bref, le mouvement n’est pas encore terminé. 

En fait, pour l’emporter, à Paris comme à Alger, Téhéran, Londres, Tunis, il faut viser le pouvoir pour… le balayer ! Il n’y a pas d’autre issue « raisonnable » pour changer l’ordre des choses. Chaque gouvernement s’appuie sur les autres, des institutions internationales, pour résister fasse aux masses. L’époque n’est plus au compromis. Le caractère autoritaire, bonapartiste de la plupart des gouvernements impose un combat classe contre classe.

Ce n’est pas – encore ? – le cas en Angleterre, Allemagne, Italie, Espagne, où le parlementarisme permet d’organiser des « arrangements ». 

En France, il faut chasser le monarque. Il n’y a pas d’autre choix sinon attendre… 2027 pour en élire un autre, élu contre l’extrême droite ! Encore que le RN progresse…

En France, la classe ouvrière n’a plus vraiment de « bastion ». Les grandes conurbations industrielles ont disparu : délocalisation, désindustrialisation ont joué leur rôle.

Un patron du CAC 40 évoquait le rêve néo-libéral d’un groupe … sans usine ! Subsistent quelques grandes usines mais pour l’essentiel, les salariés sont éparpillés dans les moyennes et petites entreprises. Les salariés constituent une écrasante majorité mais la classe ouvrière n’a plus de densité sociale et politique. Sans oublier une réussite du libéralisme avec l’existence de millions d’auto-entrepreneurs…

A certains égards, les organisations politiques à « gauche » connaissent le même émiettement. Jean-Luc Mélenchon, ces dernières années, n’a eu de cesse de dénoncer le PS, le PC, les Verts, refusant l’unité. Au lendemain de la Présidentielle, il a imposé un « sauve qui peut », l’accord électoral, la NUPES. Malgré les apparences, le résultat a été un échec. Le tintamarre parlementaire des élus de la FI offre un spectacle lamentable du combat politique. Pour l’heure, il n’y a pas d’alternative politique organisée et, dès les Européennes, la NUPES va imploser…

C’est évidemment seulement par la lutte des classes que cette situation peut changer. 

Il y a eu des luttes : il y en aura d’autres. Surtout si la mobilisation, la politisation de la jeunesse se poursuit comme à la veille de 1968. La lutte pour une écologie de combat va être déterminante.

Le retour de la guerre en Europe, la menace d’un troisième cataclysme mondial, cette fois-ci avec des armes de destruction massive pose la question de la survie même de la civilisation humaine. L’offensive du régime autocratique de Poutine contre le peuple ukrainien, ses droits fondamentaux, sa volonté de se défendre comme nation souveraine, revendication légitime qui a été combattue par Staline au prix de la terrible famine des années 1930… Ce ne sont pas seulement les héritiers du stalinisme français qui nient la qualification de génocide du peuple ukrainien par Staline : le PCF vient de tenir son 29ème congrès : Fabien Roussel s’est illustré en refusant d’engager la responsabilité du PCF dans la reconnaissance de « L’Holodomor », en s’abritant derrière la compétence des historiens, qui seraient les seuls à pouvoir décider. La France Insoumise, soutenue par le député Jérôme Legavre, pose la question : « nul ne peut nier la réalité du crime », il est nécessaire, néanmoins, de se poser la question « s’agissait-il d’exterminer le peuple ukrainien en tant que tel ?» Au bout du bout, ce sont hélas les organisations, se réclamant de la IVème Internationale (POI, POID, Lutte ouvrière), qui dénient à la population ukrainienne le droit de se défendre par les armes. Ce n’est pas la première fois, face à une guerre impérialiste, que les vieilles directions du prolétariat font naufrage.

La discussion doit donc porter sur l’objectif : imposer par l’action un gouvernement d’urgence prenant immédiatement des « réformes anti-libérales » drastiques contre le capital. Un gouvernement agissant avec fermeté et constance pour combattre le réchauffement climatique, mettre en œuvre une véritable politique écologique anticapitaliste.

Un gouvernement appuyé sur les plus larges masses, rendant des comptes en permanence, contrôlé par les citoyens, soit un gouvernement de démocratie directe. Un gouvernement révolutionnaire. C’est évidemment un objectif très audacieux mais ce n’est pas une utopie, c’est possible. Une nécessité pour tenter de changer l’ordre des choses. Les mots d’ordre tactique de lutte doivent s’inscrire dans un tel objectif.

Cette orientation doit être élaborée pour aboutir à un programme d’urgence. Au-delà du cercle des militants, ce travail exige du temps, de la ténacité, sans oublier que l’adversaire dispose de moyens policiers et militaires de l’État et de la plupart des groupes de presse et de communication.

Engager ce travail politique, c’est le contraire d’une attitude gauchiste mais au contraire réaliste. Ajoutons qu’un tel gouvernement serait la cible de tous les gouvernements libéraux aidés par les institutions « européennes ». Qu’on se souvienne de la Grèce. Il faut analyser et expliquer la réalité telle qu’elle est, ne pas prétendre à la facilité. Définir, expliquer une telle stratégie, bâtir avec les salariés, la jeunesse, ce programme d’urgence, convaincre au-delà du cercle militant exige, répétons-le, temps et ténacité. L’arme la plus efficace des opprimés c’est la démocratie. En ce domaine aussi il faut élaborer.

Ce sont quelques-uns des problèmes qui méritent la discussion, l’échange sans polémique subalterne, le débat démocratique. Essayons d’y contribuer. C’est l’ambition de notre site ouvert à tous ceux qui partagent cette espérance.

Robert D. et Charles J.

15 commentaires sur “Pour ouvrir la discussion, par Robert D. et Charles J.”

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