Depuis l’élection de la députée Martine Froger, la 1ère circonscription de l’Ariège (57000 inscrits) est devenue le sujet de moult commentaires à l’échelle nationale car elle incarnerait la crise de la NUPES.
Parmi ces commentaires, celui de Christophe Bex, député LFI de Haute-Garonne, décroche haut la main le pompon. En effet, il compare les électeurs de Martine Froger à des bourgeois “préférant Hitler au Front populaire.”! Pour quiconque connaissant les femmes et hommes des vallées ariégeoises, un mot brille par son incongruité “bourgeois”.
D’ailleurs de la parole aux actes le pas a été vite franchi. Lors de la manifestation de l’Intersyndicale pour le retrait de la réforme des retraites, à Foix, le 6 avril, un commando a agressé Martine Froger, vociférant “vendue…collabo…cassez-vous” et l’aspergeant d’eau. Or Martine Froger a toujours condamné la réforme de Macron et a participé à toutes les manifestations contre celle-ci.
Mais quelles étaient les données de cette élection ? Martine Froger était la candidate de la fédération PS de l’Ariège, soutenue par Christine Tequi, présidente du Conseil départemental et par Carole Delga,présidente du conseil régional. Cazeneuve l’a aussi appuyée. Bénédicte Taurine était la députée sortante, militante du PCF, elle avait été élue en 2017, avec l’étiquette LFI, et réélue en 2022 sous les couleurs de la NUPES.En 2023, elle était toujours la candidate de toutes les composantes de la NUPES dont le PS national. Au premier tour, en outre se présentaient un candidat RN, une candidate Ensemble (majorité présidentielle) , un Reconquête, un extrême gauche, un sans étiquette. Aucun candidat Les Républicains n’avait risqué l’aventure.
Résultats :
1er tour.
Abstentions 60%
Bénédicte Taurine 31%
Martine Froger 26%
RN 24%
Ensemble 10%
Trois autres candidats 7%
Blancs et nuls 4%.
Le soir du 1er tour, la candidate macroniste appelle à voter pour Martine Froger.
2ième tour.
Abstentions 62%
Martine Froger 60%
Bénédicte Taurine 40%
Blancs et nuls 10%
Première remarque. L’énorme taux d’abstention même s’il est moindre que pour d’autres partielles.
Seconde remarque. Le bilan politique essentiel réside dans L’EFFONDREMENT de la candidate de MACRON : 10 % !
Aucun commentateur n’a souligné ce fait majeur. Alors que la vie politique française est structurée par la question des retraites la seule candidate
défendant le gouvernement ne représente même pas 4% des inscrits. Pour bien mesurer l’ampleur de cette déconfiture regardons l’évolution des scores électoraux des candidats macronistes.
2017 : 31%
2022 : 20%
2023 : 10%
En Ariège, Macron a perdu les deux tiers de son électorat. C’est ce qui est primordial, le reste est secondaire.
“Quand le sage montre la lune, l’idiot regarde le doigt.”
Faire référence à Hitler quand les forces populaires rejettent si ouvertement Macron, c’est introduire la division et le chaos.
D’autant qu’un phénomène étonnant émerge des résultats dans de nombreux villages de montagne : Bénédicte Taurine perd des voix entre le premier et le second tour. Quelques exemples :
– Ustou, un des villages confrontés à l’introduction de l’ours slovène. Elle passe de 52 à 37 voix.
_ Luzenac,où se trouve la plus grande carrière de talc du monde (10% de la production mondiale).Elle passe de 54 à 25 voix.
_Mérens-les-vals, Haute vallée de l’Ariège dans la montée vers Andorre, le cas le plus déroutant. Elle passe de 69 à 18 voix ! Martine Froger passe de 17 à 82 voix…Le RN avait fait 10 voix, la macroniste 5 voix et le taux de participation est passé de 62,5 à 63,86%.
À l’évidence, Martine Froger a retrouvé une partie des électeurs qui avaient voté NUPES au premier tour.
L’Ariège est un département historiquement ancré à gauche. Elle a élu des députés socialistes depuis 1928. En 2017,les électeurs font payer le prix du quinquennat réactionnaire de Hollande en choisissant deux députés LFI sur les 17 de l’Assemblée Nationale. Mais LFI,mouvement gazeux sans démocratie interne, avec un Mélanchon bonapartiste ne parvient pas à s’implanter dans des territoires aux particularismes dont les habitants sont fiers, eux qui exècrent qu’on décide de leur sort à Paris. Mais c’est aussi le cas de nombreux territoires ruraux où la colère sociale s’est exprimée par le vote RN en 2022 et où LFI a reculé, phénomène occulté par ses succès dans les zones urbaines notamment le 93.
Cette récente élection fait éclater le rejet massif de Macron, la présenter comme une victoire de l’extrême droite en dénature la signification.
C’est indigne !
Hitler, certainement pas ! Macron dehors, que oui !