Sur les traces d’Hitler et du nazisme

par Yorgos Mitralias
La « Stratégie pour la sécurité nationale »publiée par la Maison Blanche début décembre est un document très important qui doit être pris très, très au sérieux. Pourquoi ? Parce qu’il décrit en détail et sans détours ce que l’impérialisme nord-américain redéfini par Trump et le trumpisme fait et entend faire. Mais il y a plus. Ce document devrait être considéré comme le texte de référence, ou plutôt la bible, de l’Internationale noire de notre époque, dominée par le tandem Trump-Poutine ! Et bien sûr, ce n’est pas un hasard si Poutine s’est empressé de déclarer, par l’intermédiaire de son porte-parole Dmitri Peskov, que le document trumpien est « largement conforme » à la vision de Moscou. (dans l’image ci-dessus, un dessin de Sonia Mitralia)
Inutile de dire que cette convergence de vues entre Trump et Poutine n’est pas une nouveauté et se manifeste déjà de manière barbare et tragique aux dépens du peuple ukrainien martyrisé. Mais il ne s’agit plus seulement de l’Ukraine. Affirmant avec force que le trumpisme fera tout son possible pour permettre à ses partis d’extrême droite européens (frères), appelés « partis patriotiques », d’arriver au pouvoir et de gouverner leurs pays, le document de 33 pages se positionne comme une force unificatrice et le centre idéologique et organisationnel de toute la racaille d’extrême droite en Europe. Et même dans le monde entier, puisque Trump a déjà tout fait, combinant menaces et chantages, pour permettre à ses favoris d’extrême droite latino-américaine (en Argentine, au Chili et au Honduras) de remporter les élections. Il s’agit là d’une évolution tout à fait nouvelle de la part de l’impérialisme américain, qui conduit certains à parler, non sans une certaine justification, de… « russification »des États-Unis, étant donné que Poutine était déjà considéré comme « le parrain et l’unificateur de l’extrême droite internationale ».
Cependant, une mise en garde s’impose : Poutine et surtout Trump ne soutiennent pas n’importe quel mouvement d’extrême droite en Europe ou dans le monde. Leurs actions ont depuis longtemps démontré leur mépris pour l’extrême droite dite « douce » et pro-européenne, et leur préférence croissante pour le soutien ouvert à ceux qui sont associés au néofascisme et au néonazisme ! En France, ce n’est pas tant Le Pen que Zemmour. Et en Grande-Bretagne, ce n’est pas tant Faradge que Tommy Robinson. En Espagne, il y a les nostalgiques de Franco, le parti Vox d’Abascal. Et bien sûr, en Allemagne, il y a l’AfD et son aile, qui nourrit ouvertement la nostalgie du Troisième Reich.
En bref, tout ce qui est le plus violent, dur, raciste, homophobe, obscurantiste, chauvin, militariste, misogyne, conspirationniste et nazi-fasciste. Il n’est donc pas surprenant que toutes ces personnes partagent avec Poutine et Trump la même « vision » d’une Europe en plein déclin « civil » et moral. Une Europe qui, selon Sergej Karaganov, le principal conseiller géopolitique de Poutine, « est redevenue l’expression la plus absolue du mal qui consume l’humanité ». Car, même si cette Europe (néolibérale) limite, viole, voire abolit les droits et libertés démocratiques de ses citoyens, il en reste encore assez pour provoquer la colère de Trump, Poutine et leurs amis qui, en bons fascistes, veulent tout abolir.
Tout abolir, comme Poutine, qui a déjà créé une Russie dépourvue de droits humains et de libertés collectives (liberté d’association, droit de grève, liberté d’association, de réunion, de manifestation et de presse). Et comme Trump, qui fait tout son possible pour imiter Poutine et même le surpasser. C’est ce que révèle par exemple une note de service divulguée début décembre par la procureure générale des États-Unis, Pam Bondi, qui ordonne au ministère de la Justice et au FBI de dresser une liste des groupes susceptibles d’être classés comme « terroristes internes ». Jusqu’ici, rien de bouleversant. Mais tout change et devient cauchemardesque lorsque la procureure générale précise ce qu’elle entend par « terroristes internes » dans sa note de service. Selon elle, il s’agit de citoyens américains qui ont « des opinions extrêmes en faveur des migrations de masse et des frontières ouvertes » !
Ceux qui « adhèrent à une idéologie radicale sur le genre », qui professent « l’anti-américanisme », « l’anticapitalisme » ou « l’anti-christianisme » ! Et aussi tous ceux qui manifestent « une hostilité envers les visions traditionnelles de la famille, de la religion et de la moralité » !!! Et tout cela avec l’aide d’une véritable armée d’informateurs qui dénonceraient leurs voisins, comme l’affirme explicitement le document de Mme Bondi. Elle « demande au FBI de transférer son système de signalement à une autorité supérieure afin qu’il puisse recevoir des informations provenant d’informateurs dans tout le pays qui signalent des menaces de ce type ».
Comme ils sont naïfs, ceux qui croient que la répression de Trump ne touche que la gauche. En réalité, Trump veut emprisonner tous ses opposants, c’est-à-dire des dizaines de millions de citoyens américains, ce qui implique l’ouverture de dizaines et de centaines de camps de concentration ! Les similitudes avec les déclarations de son mentor Hitler1 il y a près d’un siècle sont frappantes. S’adressant aux principaux capitalistes du nord de l’Allemagne, réunis au sein du Club national, le 28 février 1926, Hitler a déclaré sans équivoque : « Nous avons en Allemagne 15 millions de personnes qui ont une orientation antinationale, et tant que ces 15 millions (…) ne seront pas ramenés dans le giron du sentiment national commun, tout discours sur la reprise économique et la reprise nationale n’est que bavardage (…). C’est dans ce but que le mouvement que je m’efforce de développer et de porter au pouvoir a été fondé il y a quelque temps. Sa mission est claire : détruire, exterminer le marxisme ».
Nous savons ce qui s’est passé ensuite. Hitler a tenu parole. Trump est peut-être beaucoup plus inculte, chaotique et confus qu’Hitler, mais lui aussi tient parole. Alors, attention à tous ceux qui, comme leurs ancêtres dans les années 30 qui considéraient Hitler comme un clown inoffensif, persistent à considérer les déclarations très sérieuses et répétées de Trump qui nous mettent en garde contre ses intentions comme de simples fanfaronnades. Leur « inattention » est aussi criminelle que celle de leurs ancêtres…
Nous connaissons déjà les objections que soulèveront les sceptiques habituels, professeurs d’université et autres soi-disant « experts du fascisme », qui n’ont jamais pris au sérieux ni le danger d’une extrême droite européenne en forte expansion il y a déjà 13-14 ans, ni les affinités électives entre le nazisme et le trumpisme qui émergeaient déjà en 2016. Actuellement, ils insistent pour affirmer que les difficultés (très réelles) auxquelles Trump est déjà confronté, tant à l’extérieur qu’à l’intérieur de son pays, le contraindront à « se calmer » et à devenir plus conciliant. Rien n’est plus éloigné de la vérité et plus proche d’une illusion. Tout au long de sa vie, tant en tant qu’homme d’affaires qu’en tant qu’homme politique, Trump a été et continue d’être un fervent partisan du dicton « la meilleure défense, c’est l’attaque ». Là où d’autres abandonnent face aux obstacles et aux difficultés, Trump choisit toujours de riposter avec une détermination et une férocité renouvelées. Ne nous leurrons donc pas. Trump méprise et humilie les serviles et ceux qui se prosternent devant lui, et ne respecte que ceux qui s’opposent à lui sans compromis. En bref, comme on l’a vu à maintes reprises, Trump ne croit qu’à la dynamique du pouvoir.
Soyons donc intransigeants et construisons de toute urgence cette dynamique du pouvoir ! Ce sera très difficile, mais il n’y a pas d’autre choix face à la terrible menace existentielle que représentent Trump et son Internationale noire…
Notes :
- En 1990, la première femme de Trump, Ivana, a révélé que son mari « lisait un recueil de discours d’Hitler, intitulé Mon nouvel ordre, qu’il conserve dans une armoire près de son lit ». Trump a immédiatement nié, affirmant que le livre n’était pas un recueil de discours d’Hitler, mais son exemplaire de Mein Kampf, un cadeau d’un ami juif. Interrogé par les journalistes, cet « ami juif » affirma ne pas être juif et que son cadeau à Trump était en réalité le recueil des discours d’Hitler. Cela explique les similitudes frappantes observées entre certains discours de Trump et ceux d’Hitler. Pour plus de détails, voir The Guardian, « Discours d’Hitler publiés avec Donald Trump en illustration de couverture ». ↩︎
Repris du site « Refrattario e Controcorrente » traduction ML
