« Révolution par les urnes », « insurrection citoyenne », loin de ces amphigouris, il y aura des élections municipales l’année prochaine. Sans emphases, au plus près du terrain, des camarades partagent leurs analyses. ML
Quelle stratégie pour les élections municipales dans les Pyrénées orientales?
par Robert Duguet
A Prades, David Berrué se dit prêt, selon le journal l’Indépendant, à porter la liste « printemps de Prades ». Elle est issue d’un accord politique passé entre les Ecologistes, France Insoumise, et Génération S. Du côté de Perpignan c’est Mickaël Idrac, France Insoumise qui conduira la liste « Perpignan, Changez d’air ! », soutenue par les écologistes. Autrement dit entre Prades et Perpignan c’est une partie de « passe moi le sel, je t’envoie le poivre » qui se mène, dans le cadre de la division des forces politiques de gauche.
Le caractère donné par France Insoumise à Perpignan c’est en fait un rassemblement de type « gazeux », sans référence précise au front politique qu’était le NFP (Nouveau Front Populaire) sur un programme social qui fut avalisé par toutes les forces de gauche. Au centre des préoccupations, se trouvait la nécessité d’infliger une défaite majeure au macronisme par l’abrogation de la loi sur les retraites. Mickaël Idrac, représentant FI66 déclare sur France Bleue :
« On va faire une campagne de mailing, on a des tracts qu’on va distribuer, on va en mettre dans les boîtes aux lettres, communiquer sur les réseaux sociaux. On veut que tous les Perpignanais et les Perpignanaises qui ont envie de porter avec nous un programme de rupture se sentent légitimes à nous rejoindre. Il y aura des gens qui n’ont jamais fait de politique, de tous âges, de toutes professions. Les écologistes, les insoumis et les militants de Génération.s seront tout à fait capables de laisser leur place » (1)
Ligne populiste qui rejette tout accord de lutte pour l’Unité au sommet, intégrant tous les éléments du front de gauche dont le PS et le PCF. Pas un jour ne passe sans que le blog l’Insoumission n’attaque les positions du Parti Socialiste : hier, la suspension de la loi Macron sur les retraites et non l’abrogation.
Qu’attend donc la direction de FI pour mobiliser dans le pays pour l’abrogation, en s’appuyant sur le recul provisoire de Lecornu au lieu de hurler contre le PS ?
Aujourd’hui c’est la position des députés socialistes sur l’impôt universel qui marque un pas vers « l’oligarchie financière »… Demain sera une occasion pour FI de dénoncer à nouveau la trahison de la social-démocratie. S’il se met à pleuvoir sur une manifestation organisée par FI, gageons que ce sera la faute du PS. Rappelons que le Front politique commun en juillet 2024 lors de la dissolution de la chambre avait permis une importante mobilisation dans la rue et s’était traduite nationalement par un recul du RN dans les urnes. L’antifascisme sans le contenu de classe à gauche et dans l’Unité est inefficace.
Rappelons le résultat cuisant pour FI aux élections municipales de Villeneuve Saint Georges en janvier 2025, dans cette ancienne ville de cheminots dirigée par le PCF depuis 1945 et passée à droite récemment : le député Louis Boyard, tête de liste insoumise refuse tout rassemblement à gauche, mais privilégie des accords avec la France dite des banlieues, dont une militante d’une association islamiste comme lieutenant de campagne. Ce fut une défaite majeure pour FI de portée nationale. Cette ligne de FI ne passera pas dans le scrutin municipal de mars 2026…
Reste la question de l’existence d’une force politique à gauche qui pose la question d’un programme d’urgence sociale comme levier dans la lutte contre le RN. Le mouvement l’Après s’est fixé comme objectif stratégique d’avancer sur cette voie. Suite aux mobilisations sociales de septembre et d’octobre, il faut une traduction politique de cette montée en puissance du salariat en cette rentrée sociale. Le récent parlement de l’Après, notamment les interventions d’Alexis Corbières et de Clémentine Autain, les délégués des départements, ont insisté sur la nécessité de combattre pour l’unité, notamment pour les élections communales.
Je suis d’accord avec cette ligne et c’est pour cela que j’ai renouvelé mon adhésion en 2025 à l’Après. J’avais marqué dès le départ mon désaccord avec la ligne du regroupement Perpignan Autrement, qui sera en fait conduite par le PS et qui acte d’emblée la division des forces de gauche. Nulle stratégie n’est posée pour contraindre France Insoumise, dans une grande ville dirigée par les fascistes, à l’Unité.
Les résultats électoraux, comme ceux de LFI, sont courus d’avance. Les émules de Louis Aliot peuvent dormir sur leurs deux oreilles face à cette stratégie perdante. Le député Philippe Brun a eu raison de déclarer sur Radio J le 24 Octobre 2025 :
« En ce moment l’ennemi de classe (de LFI), c’est le socialiste. La France Insoumise a aujourd’hui le même fonctionnement que le KPD, le Parti communiste allemand dans les années 30. Ça a amené la victoire de Hitler en Allemagne, ils font exactement la même chose. Je vais m’exprimer à votre micro, je sais d’avance qu’il y aura 2 000 insultes, menaces de mort, menaces sur ma famille écrites par des trolls, de robots payés par LFI et Mélenchon. LFI c’est l’outrance permanente, c’est les fake news, c’est le détournement permanent de la réalité »
Il faut parler à l’électorat de FI et mettre la direction du mouvement et Jean Luc Mélenchon devant la responsabilité qu’ils prennent devant l’Histoire. L’analogie historique posée par Philippe Brun entre FI et la politique de division face à Hitler est fondée, toutes proportions gardées : le RN, ce n’est pas les groupes d’assaut des SA de Röhm, attaquant les locaux et les militants des syndicats et partis de gauche. Le RN se satisfait du moins pour l’instant de pouvoir prendre le pouvoir en s’appuyant sur les institutions bonapartistes de la Vème République, dans une situation où aucune force de gauche n’en conteste concrètement la légitimité. La gauche après la dissolution était majoritaire : avons-nous contesté dans la rue la légitimité de Barnier, celle de Bayrou et maintenant Lecornu ?
Comment se pourrait-il que dans une ville dirigée historiquement depuis la fin de la guerre d’Algérie par l’extrême droite, on ne fasse pas l’Unité des forces se réclamant de l’émancipation sociale et écologique ?
La question reste sans réponse.
Notes :
