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Memorial 98. Pétain:ni messe, ni pardon.

Pétain: ni messe, ni pardon.

 

La messe d’hommage à Pétain à Verdun ce samedi 14 novembre constitue un scandale et un injure à la mémoire des victimes de sa politique de collaboration avec les nazis .

Suite à la décision du tribunal administratif le groupe ouvertement pétainiste  nommé « Association pour défendre la mémoire du maréchal Pétain « (ADMP) pourra tenir cette messe.

Elle a fait annuler l’arrêté du maire de Verdu, Samuel Hazard de Verdun interdisant la cérémonie religieuse. «Je n’accepterai jamais qu’une messe soit célébrée à Verdun en hommage à Pétain», a –t-il déclaré il a également fait part de son «dégoût et [de sa] très vive colère» à l’annonce de cette cérémonie programmée pour ce samedi matin, dans l’église Saint-Jean-Baptiste de la ville. «Verdun est la cité de l’universalité. Pétain est l’antithèse de l’humanité», a-t-il ajouté. Il sera présent devant l’église afin d’empêcher la tenue de la messe et appelle la population à  se joindre à son action que nous saluons.

Le président de l’AMDP a repris la fable de Pétain « sauveteur des Juifs français », directement reprise des mensonge de Zemmour. Ce dernier a d’ailleurs été condamné par la cour d’appel de Paris à 10 000 euros d’amende,  le 2 avril 2025 pour « contestation de crime contre l’humanité » après avoir soutenu, en 2019, que le maréchal Pétain avait « sauvé les Juifs français » durant la seconde guerre mondiale.

Dès le 24 octobre 1940, Pétain rencontrait Hitler à Montoire-sur-le-Loir. Leur poignée de main lançait la collaboration

C’est lors du discours de Pétain du 30 Octobre 1940, après cette rencontre avec Hitler, qu’est annoncée pour la première fois explicitement cette collaboration, qui se déploiera dans de très nombreux aspects, au plus grand profit du Reich nazi et de ses acolytes français.
On notera que dans ce discours, Pétain indiqua qu’il s’est rendu librement à la rencontre avec Hitler, sans aucune pression allemande et qu’il utilise le terme nazi de « Führer » quand il mentionne ce dernier.  

A cette date du 30 octobre, le régime de Vichy avait

déjà promulgué plusieurs lois racistes et antisémites très orientées.

Il s’agit de la possibilité de déchoir de sa nationalité un Français naturalisé (16 juillet 1940), de l’abrogation du décret Marchandeau du 21 avril 1939 pénalisant le délit d’injure ou de diffamation raciale et l’amnistie des faits commis de ce type depuis cette date ( 27 août ) le premier statut discriminatoire des Juifs du 3 octobre (publié le 18 octobre ), l’abrogation du décret Crémieux de 1870 (qui accordait la nationalité française aux Juifs d’Algérie) le 7 octobre. 

On sait maintenant que Pétain a lui-même durci les dispositions du statut des Juifs, comme le montrent ses mentions manuscrites sur ce document, mises à jour par le Mémorial de la Shoah

Il n’a en rien constitué un « bouclier » contre les nazis comme le prétendait une partie de l’historiographie de la droite et comme le proclame l’extrême-droite et surtout son défenseur Eric Zemmour.

Nous n’oublions pas que François Mitterrand alors président de la République, a fait déposer chaque année de 1987 à 1992 lors du 11 novembre, une gerbe de fleurs présidentielle sur la tombe du Maréchal Pétain, à l’île d’Yeu, au prétexte du rôle de ce dernier lors la première guerre mondiale ( au cours de laquelle il fut d’ailleurs particulièrement actif dans le massacre des soldats révoltés ) 

François Mitterrand ayant déclaré qu’il honorait simplement la mémoire de l’homme de Verdun et nullement celle du chef de l’État français. Pour l’historien André Kaspi, une telle distinction est artificielle : « Le Pétain collaborateur de 1940-1944 n’a pu égarer les Français et en convaincre bon nombre de le suivre que parce qu’il bénéficiait du prestige du Pétain de 1914-1918. L’un n’aurait pas existé sans l’autre » ( in Chronologie commentée de la Deuxième Guerre mondiale)

Les associations de résistants et de victimes du nazisme avaient beau protester unanimement, rien n’y faisait. En 1992 le scandale fut plus important, car une large campagne publique se déroulait contre ce geste de révérence à l’égard du chef de la collaboration. 

Du coup, le préfet de la Vendée, chargé par la présidence de la République de fleurir la tombe  le 11 novembre, dut attendre cette année-là 17 h 15 pour se rendre en hélicoptère sur l’île d’Yeu, lieu de sépulture de Pétain. Il craignait  d’être confronté aux manifestants présents sur place. C’était juste après que Serge Klarsfeld et la quarantaine de personnes l’accompagnant eurent pris le dernier bateau régulier de retour de l’île. Ils étaient venus «s’assurer qu’une gerbe ne sera plus déposée sur la tombe de Pétain par le président de la République». Au bout du compte, la gerbe du préfet côtoyait celles déposées dans les heures précédentes par Jean-Marie Le Pen et par « l’Association nationale Pétain Verdun » (ANPV, émanation des nostalgiques de Vichy).  Devant l’ampleur du scandale, Mitterrand fut contraint de suspendre l’hommage à Pétain à partir de 1993, c’est à dire à la toute fin de son deuxième septennat.

En 2018, c’est Emmanuel Macron qui a voulu rendre hommage à Pétain lors du centenaire de l’armistice, avant d’être contraint de reculer.  

On notera  que Pétain avait déjà manifesté son antisémitisme lors du pogrom nazi de la Nuit de Cristal en novembre 1938

Saisi d’un texte de protestation contre ce pogrom, il avait rayé de sa main la formulation mentionnant la condamnation des « violences antijuives » au profit d’une formule plus neutre « persécution religieuses ou racistes ». Ses autres modifications vont dans le même sens d’atténuation de cette déclaration (voir ci-dessous le fac-similé de ses modifications). 

Il y a une continuité entre le programme antisémite des nazis qui envisageaient ouvertement l’exclusion et l’élimination des Juifs, la mise en pratique de cette politique lors de la Nuit de Cristal, puis le discours d’Hitler du 30 janvier 1939, à Berlin, devant le Reichstag, annonçant la Shoah en déclarant:
« Aujourd’hui, je serai encore un prophète : si la finance juive internationale en Europe et hors d’Europe devait parvenir encore une fois à précipiter les peuples dans une guerre mondiale, alors le résultat ne serait pas la Bolchevisation du monde, donc la victoire de la juiverie, au contraire, ce serait l’anéantissement de la race juive en Europe. ».

Ni messe, ni hommage pour Pétain

Ni oubli, ni pardon.

Soutien à la protestation du maire et de la population de Verdun.

MEMORIAL 98